Soit que ton bon esprit m'attire à son amour
Ou les vertus qui font près de toi résidence
Je t'aime, Torigny, et sans toi je ne pense
Que mon coeur ennuyé puisse vivre un seul jour...
(il me manque ici une strophe que je ne possède qu'en allemand)
Nous entr'aymons si fort que si l'une est absente
L'autre n'a rien qu'ennui et quand elle est présente,
Ce ne sont que sourir', que liesse et bonheur
aussi c'est bien raison vu la grandeur extrême
De ton gentil esprit qu'extrêmement je t'aime
Et que ton amitié soit de pareille ardeur
Ces vers sont adressés à Jeanne d'Albret par sa dame d'honneur Catherine d'Aster d'Aure dont on l'a séparée :
Je le requiers que me veuille permettre,
Que mon adieu ici je puisse mettre.
A Dieu je dis celle, dont la présence
J’ai désiré depuis la mienne enfance ;
Et maintenant que j’ai reçu ce bien !
Te perds de vue et ne sais pour combien.
Car un mary ou toi, ou moi prendre,
Dont éloigner ta vue me faudra.
Mais j‘ai espoir que ceux que nous prendrons,
En liberté plus grande nous rendrons
De nous revoir ; et quoi qu’il advienne,
Je te requiers que de moi te souvienne.
Car quelque part que tu ailles, ira,
Et vive ou morte à jamais t’aimera
Ta Catherine, étant d’Aste nommée,
Qui de regret est quasi assommée !
C'est drôle, ce billet entre en résonnance avec le livre que je lis en ce moment, "L'art de la joie" de Goliarda Sapienza, dans lequel une relation tendre s'instaure entre l'héroïne Modesta et la jeune princesse de la maison qui la recueille. Elles ont 17 ans toutes les deux et cette amitié amoureuse et sexuelle leur permet de panser leurs plaies respectives et de mieux supporter l'austérité qui les entoure.
RépondreSupprimerJe trouve que c'est de plus en plus rare de lire des déclarations d'amitié entre femmes ... comme si la rivalité avait pris le pas sur les liens forts qui se tissent entre elles. Diviser pour mieux régner, la sororité est une menace.
Quelle excellente idée ces poèmes d'amitié-amour entre femmes, merci! Ils sonnent tellement plus vrais que tous ceux où la poétesse se languit d'amour, d'ennui, se réfugie dans la prière etc...
RépondreSupprimer(L'art de la joie est magnifique,tout à fait d'accord avec Héloïse!)
Bon dimanche...pente ou côte, vivons.
Joli billet et bel hommage à ces tendres complicités féminines, quand les prescripteurs de l'histoire jugent bien plus profitables d'insister sur les rivalités et bisbilles féminines
RépondreSupprimerHéloïse,
"L'art de la joie" ... J'ai fini de le lire il y a peu, très joli voyage... :-)
"Te perds de vue et ne sais pour combien.
RépondreSupprimerCar un mary ou toi, ou moi prendre,
Dont éloigner ta vue me faudra."
La vie des femmes ne leur appartient pas, aussi puissantes, aristocrates ou suivantes soient-elles, ces trois vers le démontrent. Et c'est tellement rare ces écrits d'amitié entre femmes.
A Héloise : je suis allée lire le résumé du livre sur un site qui le publie. Il a l'air passionnant ! Oui l'amitié entre femmes est devenue compliquée aujourd'hui comme tout ce qui est lien à l'autre, d'ailleurs. Nous sommes prisonnier.e.s d'une grande entreprise d'isolement par des moyens dit "de communication".
RépondreSupprimerA Colo : oui, nous sommes gavé.e.s de refrains, films et manifestations en tout genre de la passion la plus destructrice et maladive et, pendant ce temps, nous n'entendons plus du tout s'exprimer les sentiments simples et normaux.
A Mauvaise herbe : là aussi, en effet, comme pour les passions qui font souffrir, les crêpages de chignons font se délecter les foules. Mais quel intérêt ? En allemand il existe un mot qui manque en francais : "Schadenfreude" : la "joie noire", pourrait-on dire. Cela consiste à prendre plaisir au récits/spectacles des déboires des autres.
A Hypathie : très juste. C'est pour cela que le mythe de la princesse comme statut idéal pour petites filles est bien menteur et pas assez souvent révisé. Car petites ou grandes les princesses étaient à quelques exceptions près complètement à la merci de la politique masculine dans laquelle on incluait les mariages.
(coucou j'suis passé voir chez superno, ben (j'ai pas tenu longtemps a lire les comms) t'es courageuse de discuter, bref)(c'est pas gagné encore l'égalité). Bisous.
RépondreSupprimerA toto : merci pour la solidarité ;) Je m'y suis sentie bien seule, en effet, mais c'est la fosse aux boucs là dedans, il faut dire ! Je comprends pourquoi les non-hommes n'y mettent pas les pieds ! Je vais faire un billet.
RépondreSupprimerMagnifiques ces poèmes. Merci de nous les faire partager.
RépondreSupprimerA Alice : je suis contente qu'ils te plaisent. Ils sont si difficiles à trouver !
RépondreSupprimerMerci de venir me voir...J'ai adoré la poésie de Beaudelaire, elle allait bien à ma minette !
RépondreSupprimerLes poésies en général permettent de dire bien des choses: j'aimerais bien en recevoir, comme on reçoit des fleurs...
Bonne soirée
A CatherineD : oui, c'est une magnifique poésie. Comme je viens de prendre deux petits chats chez moi, j'ai été très touchée par la perte du vôtre.
RépondreSupprimerOui les poésies ce sont des fleurs de mots. Il y a la forme et les couleurs. Elles charment et font sourire le coeur. Bonne soirée à vous.